« Dominique-nique-nique, s’en allait tout simplement »… Tout le monde a entendu une fois, en se baladant sur TikTok ou Instagram, ce refrain malicieux qui donne le sourire. Mais vous êtes-vous déjà posé la question de son origine ? En 1963, dans un couvent bruxellois, une jeune femme à la guitare façonne sans le savoir la légende de Sœur Sourire. Derrière la simplicité chantée de « Dominique« , il y a l’incroyable histoire de Jeanne Deckers.
Enfance troublée, élève indocile, artistes, puis dominicaine rebelle… Elle va conquérir la planète avec une chanson en français et coiffer au poteau les plus grands noms du hit-parade américain. Un tube au double sens, un destin bouleversant. « Dominique » c’est bien plus qu’un phénomène viral : c’est l’histoire vraie et tragique d’une Bruxelloise à la liberté farouche.
Bruxelles, berceau d’une chanson devenue virale sur TikTok
Impossible d’échapper à la ritournelle entraînante de « Dominique, nique, nique, s’en allait tout simplement… » qui, il y a quelque temps, a explosé sur TikTok. C’est ce nouveau coup de projecteur qui a redonné vie à une histoire belge aussi pop que tragique. Mais saviez-vous que cette chanson, célébrée aujourd’hui pour son double sens grivois, fut écrite par Jeanne-Paule Marie Deckers, alias Sœur Sourire ? Née en 1933 à Bruxelles, fille de pâtissiers, elle grandit sous la coupe d’une mère tyrannique et d’un père effacé. D’abord professeure de dessin, elle entre chez les dominicaines en 1959 où, elle ne cesse de jouer de la guitare. Séduite par son talent, la hiérarchie du couvent décide de lui faire enregistrer un disque.
La maison Philips, amusée par le projet, produit l’enregistrement, à condition que les bénéfices reviennent directement au couvent et à la maison de disque, vœu de pauvreté oblige. Pour préserver son anonymat, on l’affuble du surnom de Sœur Sourire, pseudonyme qu’elle n’a jamais aimé. En 1963, sa chanson dédiée à Saint Dominique, fondateur du célèbre ordre, conquiert d’abord la Belgique, puis toute l’Europe. Cette fable naïve, sous ses airs anodins, amuse par ses jeux de mots et charme toutes les générations.
Dominique sur le toit du monde : succès planétaire et drame intime
Mais le premier et véritable succès arrive quand, surprise générale, « Dominique » séduit les Américains. La chanson s’offre quatre semaines au sommet du Billboard, laissant dans son sillage Elvis Presley et les Beach Boys. Avec trois millions de disques vendus, Sœur Sourire décroche même un Grammy Award. À Hollywood un biopic sur sa vie joué par Debbie Reynolds inspire des milliers de spectateurs. Mais derrière la success-story, la vie de Jeanne Deckers prend vite un tournant plus sombre.
En quête de liberté, elle quitte le couvent. Son pseudonyme lui échappe, désormais propriété de l’ordre : elle devient alors Luc Dominique, entame une carrière engagée et milite pour les droits des femmes et la pilule contraceptive. À contre-courant, elle choque le public catholique et s’isole lentement. Elle partage dès lors la vie d’Annie Pécher et elles fondent ensemble un foyer pour enfants autistes, mais le Fisc la rattrape… En 1974, accablée par des dettes que ni le couvent ni la maison de disques n’assument vraiment, elle replonge dans une version électro de « Dominique » en 1982 — sans succès.
Ruinée, déprimée, elle sombre dans l’alcool. Le 29 mars 1985, elle se suicide avec sa compagne. Pourtant, son héritage ne cesse de résonner : dans les Simpsons (1992), sur TikTok et dans la pop culture. Mieux encore, en 2009, Cécile de France lui redonne vie dans un biopic qui la réhabilite enfin comme une femme rebelle, bien loin de la simple religieuse à la guitare !
Alors, la prochaine fois que vous fredonnerez « Dominique, nique, nique », souvenez-vous de la riche histoire qui se cache derrière ce refrain viral.